La belle histoire du Défi Azimut : une course en autogestion
Du 10 au 15 septembre prochain, plus de 20 IMOCA se retrouveront à Lorient La Base pour en découdre une dernière fois avant le Vendée Globe,
en solitaire et en équipage sur les trois formats du Défi Azimut : Runs de vitesse, course au large de 48 heures et Tour de l’île de Groix.
Retour en trois temps sur l’histoire de cette course pas comme les autres, née en 2011. L’équipe de la société de solutions informatiques Azimut s'est convertie en organisateur le temps d'un événement en fin d'été afin de répondre à une demande des marins, sans jamais renoncer à ses valeurs : exigence, simplicité et convivialité.
C’est d’abord l’histoire d’un mec ! Passionné de voile et de sports nautiques, Jean-Marie Corteville quitte les Yvelines, où il a appris l’informatique mais aussi la voile sur le plan d’eau de Saint-Quentin, et pose son sac à Lorient pour y créer la société Azimut en 1994. Les vacances de la famille Corteville se passent à caboter sur un modeste Corsaire, aux proportions bien éloignées des 60 pieds Open, futurs IMOCA, qui font rêver l'entrepreneur. Histoire de joindre l’utile à l’agréable, Jean-Marie prospecte dans le secteur pour proposer ses services, d’abord à la Classe Mini puis à l’IMOCA.
Logiciels de gestion de classe, sites web, bornes interactives… et voilà le chef d’entreprise embarqué en 2010 par Gaëtan Gouerou, alors directeur de la Classe IMOCA à Barcelone, pour le départ de la Barcelona World Race, tour du monde en double. « Là, j’ai commencé à rencontrer des skippers, les Gabart, Riou, Desjoyeaux et le courant est passé. C’étaient des discussions de bistrot mais j’ai compris qu’ils étaient en demande. J’ai pris les gars au mot et leur ai dit : l’an prochain, vous venez à Lorient, je vous fais un parcours et je vous invite à boire des coups !… ».
Discussions de bistrot prises au mot
De retour dans le Morbihan, l’idée fait son chemin et, avec l’appui d’Armel Le Cléac’h notamment, les contours d’un Défi Azimut prennent forme petit à petit. « Beaucoup d’IMOCA étaient sur place et comme les équipes commençaient à être bien structurées, les bateaux étaient prêts assez tôt avant les grandes courses. On avait besoin de petits parcours avec un peu plus de pression que les entraînements de Port-la-Forêt, mais on n’avait pas envie de se prendre la tête ! » raconte le skipper Banque Populaire, qui s’apprête alors à disputer son deuxième Vendée Globe, déjà sous les couleurs de la Banque de la Voile. « Dès le début, on s’est mis d’accord sur 24 heures au large et nous avons eu l’idée des Runs et du Tour de Groix en clôture : ils invitent leurs équipes, Azimut invite ses partenaires. Le deal a bien marché. Armel pilotait le cercle de skippers et nous on se débrouillait avec l’UNCL (Union nationale pour la course au large), le port, les autorités,… C’était une histoire en autogestion ! » se souvient Jean-Marie Corteville, qui n’entrevoit que sommairement la liste des tâches à effectuer. « On partait d’une page blanche, confirme Armel. Ni Azimut ni moi n’étions organisateurs de course. On a un peu bricolé, il a fallu trouver un directeur de course (Jacques Caraës) mais tout le monde avait beaucoup d’énergie et ça s’est bien passé. Jean-Marie et Candice ont une capacité d’écoute qui plaît aux gens. Ils n’imposent pas leur point de vue. »
Jean-Marie à la création, Candice à la direction
C’est aussi l’histoire d’une fille ! Directrice Commerciale & Marketing d’Azimut, Candice Crépeau ne pratique pas la voile, mais le handball, le surf, le vélo.... La passion de la compétition la fait vite plonger dans l’aventure du Défi lorsque Jean-Marie partage l’idée. Son énergie et son charisme en font une excellente ambassadrice auprès des skippers, des partenaires, des fournisseurs. « Elle n’a peur de rien ! » dit d’elle son alter égo Jean-Marie, qui peut compter sur elle les yeux fermés : fédérer et organiser les différentes équipes comme le CNL, la Cité de la Voile Eric Tabarly, la Direction de course, le port, les teams, la classe IMOCA, l’équipe Azimut, dans un esprit convivial mais de performance est la marque de fabrique de Candice. « Nous nous sommes appuyés sur les skippers et leur expérience. Nous avions à apprendre, de petits moyens mais une vision assez claire des choses et une motivation débordante : faire un événement de haut niveau, de qualité et convivial. »
2011, grande première !
Le 23 septembre 2011 finalement, cinq IMOCA tirent sur leurs amarres devant l’ancienne base des sous-marins de Lorient pour disputer le premier Défi Azimut. Il fait beau en cette fin d’été, et il flotte dans l’air léger un parfum d’insouciance. À l’image de celle de Louis Burton, qui dispute là avec son frère Nelson sa première régate en IMOCA. Le bizuth, qui n’a jamais raté un Défi depuis, a face à lui les ténors de la Classe. Le futur vainqueur, deux mois plus tard, de la Transat Jacques-Vabre, Jean-Pierre Dick, associé à Jérémie Beyou, mais aussi les premier et deuxième du Vendée Globe de l’année suivante, François Gabart et Armel Le Cléac’h. Vincent Riou, lui, s’étonne de ne pas trouver le tableau d’émargement avant d’embarquer sur son PRB, et pour cause : il n’y en a pas ! « Emarger, on apprend ça en Optimist ! » lance le coureur à l’organisateur. Réponse de Corteville : « Désolé Vincent, mais moi, c’est ma première régate ! »
Vincent Riou n’émarge pas mais inscrit le premier son nom au palmarès du Défi Azimut, performance qu’il ré-éditera par deux fois en 2012 et 2015. Depuis, les tableaux d’émargement font bien partie des documents de course de l’épreuve qui s’apprête à connaître sa quatorzième édition au mois de septembre, en solitaire cette fois, année Vendée Globe oblige.
De l’eau a donc coulé sous les ponts, et d’une édition à l’autre, le Défi n’a cessé de prendre du coffre pour devenir une classique du circuit IMOCA. Avec à la clef, une foule d’anecdotes et de bons souvenirs. Un Défi tous azimuts, ce sera le second volet de cette petite saga !